Les lutteurs de Kirkpinar.

KIRKPINAR, ou Source des Quarante, du nom des quarante compagnons d’Orhan Gazi qui, avant de s’en aller ravager la Thrace, s’adonnèrent là au sport national qu’était la lutte : deux d’entre eux, qui y laissèrent leur peau, auraient miraculeusement engendré la source en 1360.
Situé dans l’île de Sarayici, près d’Edirne, le festival accueille depuis 650 ans les « Pehlivans ». Lutteurs de tous âges, seuls ou en clubs, ils arrivent des quatre coins de la Turquie pour essayer de remporter l’« altim kemer », la ceinture d’or.

Enduits d’un mélange d’huile d’olive et d’eau et revêtus de pantalons de cuir de buffle, les combattants, divisés en cinq catégories, doivent retourner leur adversaire face au ciel pour gagner. Avant le combat, les lutteurs entament une danse ancestrale, le « Peshrev », ode à la fraternité. Les combats sont ensuite rythmés par les tambours et la zurna( clarinette) qui ne s’arrêtent jamais comme une transe qui viendrait entêter les lutteurs. Le « Cazgir » qui joue le rôle de l’arbitre, commente les prises tel un conteur pour enflammer le public et encourager ses pehlivans.

Cette fête est considérée comme un emblème de la virilité en Turquie. Toute la Nation turque, hommes, femmes et enfants, aime la lutte, la respecte et sans nul doute reconnaît un privilège aux lutteurs. Cette sympathie et ce respect proviennent des sentiments de guerrier et d’héroïsme qui existent dans l’âme des turcs. Les lutteurs sont très forts, ont un corps bien formé, un comportement brave et un caractère juste, digne qui donne confiance.
Cette année, et au delà de la ceinture d’or, le gain du vainqueur de la première catégorie, les Baspehlivans, à la base de 7000 euros (deux fois le salaire annuel moyen turc) a été multiplié par deux par le « Kirkpinar Lord », le mécène qui tel un roi ovationné ou hué par la foule, aura enchéri le plus.

Emmanuel Blivet 2006.